Il marche j’entends, traverse des routes, assomme le macadam de son pas pressé et de ses jambes qu’il balance démantibulées sur l’avant, et il entre à nouveau en lieu clos, disparaît, happé. Là, depuis leur point de rencontre, tous deux avancent dans les allées marbrées du centre commercial. L’air est chauffé et, alors que mort de froid s’en suit au dehors, on peut paresser le long des ampoules du vaste miroir de maquillage dont les enseignes se succèdent. Monde, monde, monde. Ils se jouent du flux en solitaires dans les artères où une population d’ermites s’ignore sans le savoir, tant cette qualité leur paraît odieuse, et aussi un peu honteuse. Ils rentrent parfois dans les magasins, l’un derrière l’autre, dans ces grandes morgues d’objets clonés et tous inanimés embrochés sur les cintres, les tringles, les barres les broches les tiges, entassés dans la fosse commune. L’air réservé avant l’achat. Elle ne sait pas, lui non plus d’ailleurs. Et puis un clin d’œil sous Cellophane : pellicule transparente, fabriquée à partir d’hydrate de cellulose et utilisée pour l’emballage, une belle couleur, et les fils de la mémoire s’électrisent sous le charme. On va prendre celui-là. Et puis on en prendra même deux.