Les rideaux sont tirés, comme à l’accoutumée, et les pinceaux de soleil qui filtrent quand même jusqu’au sol arrivent difformes sur le plancher. Ils y font des taches, des flaques, des vagues, des lacs, des rivières ; des paysages mouvants à perte de vue qui seraient simplement annihilés par une lampe de poche.
Les minces grumeaux de molécules qui planent dans l’atmosphère, à portée de main, se dégagent vivement en tourbillons au moindre mouvement. On pourrait pratiquer la brasse. Ils ne sont visible que lorsqu’ils rencontrent un trait de lumière directe qui les illuminent au passage. Ils en dessinent alors les contours et, par leur reflet pâle, forment de son halo toute une voie lactée.
L’espace de la pièce est entièrement bleuté et c’est ce bleu qui donne aux visages leur teint décomposé. C’est une clarté diffuse qui ne procure pas de vraie chaleur, entièrement baignée de la réverbération du papier peint, digne d’une chambre d’enfant, où des bateaux à voiles traversent paisiblement la mer d’une huile turquoise et ses vapeurs.
L’ambiance est fraîche, pourtant, humide. C’est un peu celle d’un aquarium. Elle n’est pas vraiment froide, mais fraîche, et la secrétaire de l’agence a la chair de poule dans son mince déshabillé noir. Encore à l’instant, elle se frottait les avant bras avec pudeur et modestie. On aurait pu, au moins, conseiller au visiteur d’enfiler un petit ciré.